La littérature s'est emparée du numérique, non seulement comme d'un outil mais aussi, et essentiellement, comme d'une formidable résonance aux questions qui sont siennes, pour entrer elle-même en résonance avec son époque. Utopie de l'intelligence artificielle tout d'abord, qui donna vie au premier générateur informatique de texte en 1952 avant de se fondre dans la question esthétique de l'oeuvre variationnelle et combinatoire dès 1959, forme rejetée pour sa dimension désincarnée par la poésie animée au milieu des années 1980. S'en suivront la quête de la liberté toute postmoderne du lecteur avec l'apparition de la fiction hypertextuelle en 1987, puis le développement des démarches participatives ou collaboratives avec le développement de l'Internet et l'avènement du flux, du texte pointé, de l'océan textuel dans lequel les oeuvres pêchent leur matériau, souvent à la volée : cadavres exquis de la littérature des moteurs de recherche. Les formes littéraires numériques qui se succèdent participent ainsi aux débats et combats culturels qui animent la société, jusqu'à aujourd'hui où elle dénonce deux tendances : le simulacre du livre à travers liseuses et tablettes et