Dans les Commentaires de la guerre des Gaules de César, le terme d’”oppidum” – qui désigne dans ces écrits toute forme d’agglomération fortifiée – est utilisé afin de décrire ces sites gaulois particuliers qui témoignent à la fois d’un fort élan de cohésion sociale et du développement d’une politique territoriale centralisée. D’un point de vue chronologique, ce type de site s’inscrit dans un cadre précis : celui des deux derniers siècles avant notre ère, soit le La Tène D1 et le La Tène D2.
L’étude ici entreprise vise à aborder la question de la compréhension du rôle des productions animales au sein de ces nouvelles formes d’urbanisation. L’enquête cherche ainsi à recentrer la problématique sur un aspect économique spécifique, celui des ressources carnées et de leur gestion : quelle est la part prise par cette production dans l’économie générale des populations gauloises ? Peut-on entrevoir, au sein des sites, une sectorisation stricte des quartiers en fonction des activités bouchères pratiquées ? Qu’en est-il des importations carnées et donc des interactions entre agglomérations et sites producteurs ? À qui ces ressources alimentaires produites étaient-elles destinées ? S’inscrivaient-elles dans une démarche ”commerciale” à grande échelle ?
L’enquête projetée entend ainsi envisager ces problématiques économiques par le biais de l’étude de la faune provenant principalement de Condé-sur-Suippe, localisé sur le territoire des Rèmes, et de Villeneuve-Saint-Germain, capitale du peuple suession. Respectivement datées de 120 à 90 et de 90 à 40 av. n. è., ces agglomérations fortifiées figurent parmi les plus importantes d’Europe, non seulement en raison de leur taille et de la conservation exceptionnelle des plans d’urbanisme mais aussi en raison de leur richesse faunique presque inégalée. Des comparaisons entre les deux sites étudiés et leurs voisins, à savoir les sites ruraux synchrones de statut a priori inférieur, tendrait ainsi à éclairer d’un jour nouveau le rôle de ces agglomérations fortifiées qui matérialisent l’aboutissement d’un long processus de stratification de la société gauloise.
English abstract
In Julius Caesar’s Commentaries on the Gallic War, the term “oppidum” – used to designate any fortified community – indicates those particular Gaulish sites which are characterized both by a strong tendency to social cohesion and the development of a centralized territorial policy. From a chronological point of view, these sites are limited to a very precise period: the two last centuries BCE, from La Tène D1 to La Tène D2 (120–30 BCE).
The purpose of this study is to define the role of animal production within the new urban structures. Hence, the research focuses on the specific economical aspect of meat resources and their management: what is the place of this activity in the economy of Gaulish peoples? Is it possible to detect within the sites any precise organisation in sectors in relation to the butchering activities? What about the meat imports and, consequently, the interactions between the communities and the sites of production? Who was the target of the produced food resources? Were they part of some large-scale “sales strategy”.
The research aims to approach these economic issues through the study of the fauna remains recovered mostly from Condé-sur-Suippe, in the territory of the Remi, and also from Villeneuve-Saint-Germain, the capital of the Suessiones. Dating respectively from 120 to 90 BCE and from 90 to 40 BCE, these fortified communities are among the most important in Europe, not only because of their size and of the exceptional conservation of their town planning but also because of their almost unequalled faunal wealth. The comparison between the two sites and their neighbours, i.e. contemporaneous rural sites of an a priori inferior status will hence attempt to cast a new light on the economic role of these fortified communities which are the outcome of a long stratification process within the Gaulish society.